Test de munitions 22Lr


Les Tests de munitions 22LR


I. Pourquoi faire des tests ?

Il faut revenir à certains éléments fondamentaux :

- Deux canons du même modèle, fabriqués le même jour chez le même fabricant sont différents. Des variations minimes dans l’homogénéité du métal utilisé, dans la régularité du perçage, dans la rectitude du canon entraînent des variations importantes dans sa réaction à un tir.

- Un lot de munitions est un ensemble que nous allons considérer comme homogène dans son comportement. Il s’agit d’un certain nombre de cartouches fabriquées sur une ligne de production dans un temps donné avec des réglages stables sur les machines (emboutissage des disques de laiton, matrissage des ogives, mise en place de l’amorçage, dosage de la poudre, enfoncement de l’ogive, sertissage de l’ogive).

- Un canon déterminé va réagir plus ou moins bien à un lot de munitions donné.

- Un bon lot dans un canon peut donner de mauvais résultats dans un autre canon. (C’est théorique car souvent un bon lot reste correct dans un autre canon. En fait, un bon lot a des qualités intrinsèques probablement issues de la régularité mise dans sa production).

- Tous les fabricants mondiaux de munitions 22LR sont capables de produire de munitions de match compétitives. Il ne faut donc pas exclure un fabricant, même si certains osent dire que la marque X ne fabrique plus de bonnes cartouches et qu’il ne faut plus tirer que de la R-EPS de chez Y. Soit c’est une bêtise, soit c’est qu’ils ont un avantage caché à favoriser une marque plutôt qu’une autre. Pour mémoire, les fabricants sérieux qui produisent des quantités suffisantes sont (dans l’ordre alphabétique) : ELEY, FEDERAL, FIOCCHI, LAPUA, RWS, SK (idem Lapua).

- Et puis le plus important, un tireur de bon niveau a besoin de bonnes cartouches. En ayant le plus grand respect pour les pistoliers, il est évident qu’un tireur couché à 50m a des besoins en matière de précision différents de ceux d’un tireur de V.O. à 25m. Et comme le dix à 50m est très petit, il faut vraiment des bonnes munitions.

Donc fin de la première discussion : vous savez tirer couché, il vous faut donc des cartouches à la hauteur de votre niveau de performance.


II. Comment faire des tests ?

En gros, quatre méthodes sont utilisables :
- Le tir à l’épaule en situation de tir.
- Le tir à l’étau.
- Le tir avec une machine à tirer.
- Le tir façon bench-rest.

Le tir à l’épaule en situation de tir est certainement le plus simple à mettre en œuvre d’un point de vue matériel. Vous avez tout ce qu’il faut. Il va simplement parfois vous manquer la qualité technique nécessaire pour annoncer parfaitement chaque balle. En clair, si vous tirez habituellement 570, il faudra accepter de ramener des groupements qui valent 95 sur 100. Cependant, cette technique a une grande qualité. En effet, elle correspond exactement à la réalité du tir en compétition. Si, dans cette situation, vous faîtes de super groupements, c’est que votre lot convient à votre arme. En plus, elle permet de s’acclimater à la réaction induite par la munition. En effet, certaines munitions « claquent » plus que d’autres et il faut apprécier ce genre de réaction pour bien tirer avec.

Le tir à l’étau nécessite un peu de matériel. Il vous faut une base en béton bien solide, du genre 80 X 80 par 100 cm de hauteur et un bon étau de fraiseuse à base tournante (histoire de pouvoir s’aligner sur la cible). Il sera fixé sur des tiges filetées prises dans toute la hauteur de béton. On peut mettre une feuille de plomb entre le béton et l’étau pour lui assurer une bonne assise. L’arme sera serrée soit par le canon (à quelques centimètres en avant de la boîte de culasse) ou par la crosse (attention à ne pas trop serrer) ou par une pièce montée dans le rail de la cale à main. C’est la méthode ensuite la plus rapide. Il suffit de tirer à un rythme raisonnable. Une critique néanmoins, cette méthode s’éloigne beaucoup du tir réel. L’arme est bridée bien plus fortement que par un tireur en position. Le serrage sur le canon modifie les vibrations induites par le départ du coup. Cela a pour effet en général de gommer certains défauts des munitions comme une vitesse initiale ou une inflammation irrégulières.
Pour des raisons liées à la dissipation des vibrations, il existe des étaux meilleurs que d’autres. Il suffit de le savoir et d’avoir un lot de référence qui va vous servir d’étalon pour tester l’étau en somme.

Le tir avec une machine à tirer se rapproche beaucoup du tir à l’étau. Simplement l’arme est tenue dans une « machine » qui absorbe le recul de l’arme et doit assurer son replacement à la position initiale. C’est souvent à ce niveau que les problèmes peuvent arriver. Une irrégularité dans ce positionnement et c’est l’écart en cible assuré.

Le tir façon bench-rest nécessite un jeu de trépied, une lunette de bench et éventuellement une crosse adaptée ( à fût large et plat). Cette technique demande de la finesse car la moindre variation dans les contraintes imposées sur l’arme occasionne des écarts en cible. Cependant, l’avantage réside dans le comportement de l’arme qui est très proche de la réalité.

Vous avez trouvé la méthode qui vous convient, maintenant il vous reste à choisir le bon protocole.
La méthode la plus courante consiste à tirer quelques coups de flambages puis des séries de 10 coups. Les coups de flambage sont nécessaires car votre canon va s’habituer à la munition et notamment au lubrifiant sur l’ogive. On estime que trois coups au moins sont nécessaires et c’est un minimum.

Sur le nombre de coups par groupement, c’est une question de moyens. Si vous pouvez faire des groupements de 30 ou 50 coups pour discriminer deux lots qui vous semblent bons tous les deux, c’est bien car on se rapproche de la réalité du match. Si vous avez une boîte de chaque lot à tirer, vous pouvez faire : 5 de flambage, 10, 10, puis si le lot est bon, on recommence 5 de flambage et un groupement de 20 coups. C’est juste un exemple.
En ce qui concerne le rythme de tir, il faut essayer de le garder aussi régulier que possible et pas trop éloigné de la cadence réelle en match. Une balle toutes les 10 à 15 secondes est probalement une bonne base.

Il vous faudra choisir un jour sans vent ou un stand indoor pour vos tests car un petit vent dégrade rapidement un groupement de test (voir l’article dédié au tir dans le vent).

III. Comment analyser les tests ?

Vous avez maintenant différents groupements réalisés avec des lots différents en suivant un protocole et des conditions identiques.Quel lot choisir ?
Le meilleur me direz vous. En effet, mais définir le meilleur lot n’est pas toujours chose facile.

En général, on regarde plusieurs facteurs :

Le diamètre du groupement. C’est un élément clef, mais pas unique. Pour donner des références, j’ai vu un paquet de tests de munitions (les miens, ceux du club, de la fédé, ou pour le biathlon) et j’ai très rarement vu (deux ou trois fois) des groupements de 10 coups à 10mm ou moins. Alors en moyenne, il faut savoir être très heureux avec des groupements réguliers de 13 à 15 mm.

La régularité du groupement. Un groupement bien rond est préférable à un groupement avec des écarts qui « sortent », surtout à l’étau car cela limite l’amplitude des écarts. Non seulement la balle qui sort peut entraîner la perte d’un point mais en plus, si le tireur modifie son réglage sur la hausse il peut passer de l’autre côté du dix sur la suivante. Total des opérations : deux points dans la nature.

La construction du groupement. Il s’agit de regarder dans une lunette l’arrivée des projectiles. On voit ainsi le déroulement de la construction du groupement. Je préfère une construction qui évolue dans une direction doucement que d’avoir des balles qui font les quatre coins du groupement en permanence.En terme statistique, on peut parler d’un écart-type faible.

La régularité de la vitesse initiale. Elle se mesure à l’aide d’un appareil spécifique (un « chronographe »). Plus elle est régulière, plus la réaction ressentie à l’épaule a des chances d’être également régulière.

La régularité du bruit engendré par le départ. Un écart dans le volume sonore peut provenir d’une inflammation inhabituelle de la poudre.

Pour en revenir au chapitre 2, le mieux en cas d’égalité entre deux lots est de les tirer lors d’entraînement ou de matchs. Un bon score sera la meilleure preuve de la qualité d’un lot. Ce contrôle est d’autant plus important que les tests ont été réalisés à l’étau.

IV. J’ai un bon lot, puis-je l’améliorer encore ?

Plusieurs moyens sont utilisables pour améliorer votre lot de cartouches (nous n’allons utiliser bien sûr que des tests non destructifs) :

Le contrôle visuel. C’est pas cher et ça ne demande pas de moyens techniques particuliers. Il suffit d’observer les cartouches pour votre match. On va rejeter les défauts importants sur l’ogive, un graissage incomplet ou irrégulier de l’ogive,…

Le contrôle par pesée. Il vous faut une balance de précision au millième de gramme. On pèse les munitions et on rejette celles qui sortent d’une gamme de 10 milligrammes autour de la valeur moyenne. Exemple : pour une valeur moyenne de 3,330 grammes, on accepte toutes les cartouches entre 3,325 et 3,335g. Cette méthode part du principe qu’une cartouche avec une masse hors-norme est une cartouche différente des autres et qu’elle a plus de chance que les autres d’avoir un comportement hors-norme. On évite aussi le risque d’une cartouche sans poudre (la charge représente 7 centièmes de gramme).

Le contrôle de la géométrie du bourelet. Il existe des appareils qui permettent de vérifier l’épaisseur du bourelet sur l’étui. Il faut également sortir les cartouches qui s’écartent de la moyenne constatée. Cela permet de garantir une grande régularité au niveau de la feuillure.

Le contrôle de la géométrie de l’étui, de l’ogive et de l’interface entre les deux. Il faut des micromètres de précision ou un projecteur de profil pour vérifier les différentes dimensions des composants de la cartouche. Cela est relativement difficile, notamment sur l’ogive, car on mesure en fait dans ce cas la dimension de l’ogive (dimension importante) et du lubrifiant (dimension beaucoup moins importante). De plus, la mesure peut dégrader un composant « mou » comme l’ogive. Un contrôle de la concentricité et de la coaxialité de l’ogive par rapport à l’étui est probablement utile (voir l’article supra).

Le contrôle radiographique de la cartouche. Attention, il vous faut un laboratoire digne des Experts Miami. Cela consiste à faire des clichés radiographiques des cartouches pour voir la répartition du mélange d’amorcage dans l’étui (pour écarter les munitions avec des remontées d’amorcage le long des parois de l’étui) et pour voir la partie cachée de l’ogive.

V. Quelques précautions

Maintenant vous avez un super lot pour votre match. Toutes les cartouches sont conformes à vos attentes. Vous pouvez encore tout gâcher :

- mettre les cartouches sur la plage arrière de votre voiture en plein soleil au mois de juillet à Bordeaux. C’est le meilleur moyen d’avoir des cartouches bouillantes au moment du match. Cela entraîne une augmentation notable de la vitesse initiale. Et parfois les munitions dépassent la vitesse du son légèrement ce qui annule toute volonté de précision.
- mettre les ogives au contact du paillason ou du tapis de tir. Dans cette situation, la graisse présente sur l’ogive va attraper toutes les cochonneries présentes (grains de sable,…) et elles vont passer au contact du canon à 300 m/s. Bonjour les dégâts à terme. C’est comme passer du papier de verre en permanence dans votre canon.
- retirer le lubrifiant des ogives. Il sert à assurer une liaison mécanique régulière entre le canon et l’ogive. Il garantit un frottement relativement faible et limite les risques de dépôt de plomb. Dans le cas contraire, le plomb nu a une tendance naturelle à s’accrocher à la moindre aspérité sur la surface interne du canon. D’où enplombage, usure, difficulté pour chamber la cartouche,…

Eric BERTHILLIER

Machine pour tester la coaxialité de l’ogive par rapport à l’étui

J’ai enfin ma nouvelle machine à tester les cartouches 22LR dotée d’un comparateur au millième de mm.
Elle permet de tester la concentricité (coaxialité et concentricité cumulée en réalité) de l’ogive avec l’étui.
Les tireurs américains (Mattew Emmons) évoquent un gain important en sélectionnant sur ce critère.
Sur une boîte de bonnes cartouches, il y a déjà de gros écarts d’une cartouche à l’autre.
Pour info, un tour complet de cadran sur le comparateur correspond à 20 centièmes de millimètres.
D’après mes infos, un défaut de concentricité qui augmente en moyenne de 2,5 centièmes de millimètres augmente la taille du groupement de 2,5mm.

Jeudi soir :
- pesée de 50 cartouches : J’ai fait 5 lots de 10 cartouches avec un défaut croissant.
- Plus faible défaut 7microns.
- Plus gros défaut 88 microns.

Voici les résultats des premiers tests :

cible1

Voici les résultats du test du week-end dans les conditions suivantes :
Lot de tenex Ultimate EPS dans la moyenne de mes lots (ni le meilleur, ni le pire),
Canon Unique 28mm, fluté avec rallonge, serré à l’étau par des mors en alu 3 centimètres en avant du boitier.
Température aux environs de 16°. Presque pas de vent.
15 coups de flambage. 5 groupements de 10 coups tirés dans le desordre pour ne pas être influencé par l’encrassement progressif du canon. Cartouches uniquement triées sur le défaut de concentricité.
Pause de 2 minutes entre chaque groupement. Un coup toutes les douze secondes.
De haut en bas, les groupements effectués avec les défauts de concentricité décroissants (de + ou – 5 centièmes à + ou – 1 centième).
On passe de 16,6mm à 13,3mm. Le groupement dans la contre-cible tourne autour de 17,5mm sur 65 coups tirés (flambage et test).
Mes impressions lors du tir : La construction du groupement se fait de manière plus chaotique avec les cartouches présentant les plus gros défauts. Avec les meilleures cartouches, le nombre de balles qui passent « au centre » augmente (d’ailleurs sans la balle perdue, le meilleur groupement tombait à 11,8mm).

J’utilise cette technique de sélection depuis cette saison (2009) et j’ai remarqué que malgré le manque d’entraînement les résultats étaient très corrects : CN Beaulieu 587 (après 2 entraînements), CN Chabris 593 (après un entraînement), CN Moulins 591 (sans entraînement en 15j), Départementaux Chambéry 591 (sans entraînement depuis Moulins…).

Eric BERTHILLIER

Machine pour mesurer l’épaisseur du bourrelet des 22LR

instrument

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